samedi 15 décembre 2007

Ca craque...

Décembre ! Décembre et son cortège de fêtes ! Décembre et les enfants aux joues rosies par le froid qui courent dans les rues ! Décembre, vacances en famille, dinde aux marrons, repos et farniente !

Mouais...

Décembre, rhumes et nez qui coule, décembre valises sous les yeux, décembre gamins crevés et insupportables, décembre et la fatigue qui s'abat sur vous après vous avoir fait croire qu'elle vous avait oublié...

Décembre a un drôle d'effet sur le quartier général des enseignants de mon collège, j'ai nommé la salle des profs. Ah, la salle des profs ! Sanctuaire inviolable, qui vaut, à l'élève qui y pénétrerait par inconscience ou par une coupable témérité, les foudres du CPE, de l'administration et même de ses camarades ! Eh oui, entendu alors que je traversais la cour : "Déposer quelque chose dans la salle des profs ! Non mais t'es trop fou, toi !"
Comme tout lieu interdit, j'ai l'impression que l'endroit avive les imagination. Je donnerai cher pour savoir comment il apparaît aux yeux des élèves. Un lieu de rituels occultes à la Lovecraft, où nous confectionnons à longueur de récréations des poupées vaudou de nos cancres ? Un atelier de cybernétique ultra perfectionné dans lequel nous remplaçons nos membre bioniques, vaincus par une série de correction de copies trop intensives ? Tiens, sujet d'écriture d'invention intéressant, le jour où j'aurais une classe de sixième... "Décrivez la salle des professeurs telle que vous la voyez."

Enfin, j'ose espérer que peu d'élèves lirons ce qui suit, car je considère qu'il est très cruel de briser ainsi des mythologies personnelles.

Or donc, notre salle des professeur ressemble pour l'instant à... euh... Rien, en fait. Il m'a été rapporté à mon arrivée que cette année serait l'Eden, car l'antique pièce dans laquelle nous nous retrouvons allait enfin avoir le droit à des rénovations. C'est le cas. Le seul problème est, que, bien entendu, il ne nous est pas possible de déménager durant les travaux. Et, depuis quelques semaines, nous prenons donc notre café entre deux pots de peinture, une armoire bancale et des classeurs éparpillés par terre.
Ironie du sort, décembre fait que notre humeur ressemble à l'endroit : bordélique. Ne fréquentant mes collègues que depuis deux mois et quelque, je n'avais alors vu d'eux que leur aspect "profs en pause". La plupart d'entre eux sont charmants, entendons-nous bien, mais un changement radical s'est opéré depuis quelques temps. Voilà que Maman Histoire-Géo laisse un peu tomber le sourire tonitruant pour s'affaler sur une chaise, le regard vide, espérant récupérer avant l'heure prochaine. Tutrice, toujours tirée à quatre épingle, la voix douce et posée, commence à raconter des conneries ; sa caféine à elle, c'est le délire, semble-t-il, et je suis ravi de lui en offrir une dose à l'occasion. Même Beau Gosse, habituellement imperturbable, arrive débraillé, l'écharpe de travers, et confesse, presque honteux que, oui, quand même, il préfère enseigner à des Troisièmes qu'à des Sixièmes.

Je les observe. C'est bizarre. Depuis le début de l'année, c'est la première fois que je les vois admettre que la glorieuse caravelle de leur équipe pédagogique, c'est plutôt un radeau, dont les planches ne tiennent pas vraiment droit, et que chacun s'emploit à écoper en espérant que l'eau ne mouillera pas trop leurs petits protégés. Ouais... ouais, en fait, ce travail, c'est un bordel organisé. Chaleureux... Pour le moment.

Décembre, le moment où l'on se serre les coudes.

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